I've got trouble, trouble, trouble
Always knocking at my door
Yes I'm a whole lot of trouble baby
Just like a kid in a candy store
SWIFTERLY/TUMBLR, AGUILERA.
★★★

C'est vrai. Un million de dollars ne m'a pas suffit. Ce qu'il me fallait à moi, c'était tout. Il a bien sûr fallut que je me rende à l'évidence: on ne peut pas toujours tout avoir dans la vie. C'est pourquoi je me suis résignée à faire sortir Drew de la mienne. Que personne ne s'y méprenne, je n'ai fait que nous sauver. D'abord lui. Moi. Mais surtout nous. Éviter ce qui n'allait plus tarder à être inévitable.
Le bonheur nous aurait écœuré.
Je me souviens de tout, de nous, mais surtout de toi. Je me souviens de tes yeux, de nos rires, de ton sourire. De tes mots et de ceux que je n'ai jamais su te dire. Je me souviens de la façon dont j'ai préféré la douleur de tout briser plutôt que de choisir l'agonie de tout perdre. Cette époque s'éloigne toujours un peu plus chaque fois que le jour se lève. Tout me semble si lointain désormais. Tout n'est plus que passé. Souvenirs. Des souvenirs qui font mal. Parce que ton absence me fait mal. Elle m'envahit, me brûle, me ronge. Et le simple fait de respirer me prend aujourd'hui toutes mes forces.

Je ne bouge pas. Je reste là assise au beau milieu du salon à sombrer dans la pénombre que supporte cet appartement qui comme le reste du monde me paraît sans espoir, où le temps semble s'être arrêté et dont l'odeur infâme de la solitude et du tourment règne tristement. Le regard vide, les jambes repliées contre moi, j'écoute le ciel pleurer depuis des heures. Je serre ma tasse au creux des mains et constate que la chaleur de l'infusion s'est dissipée certainement depuis un moment déjà dans l'air glacé. La télévision, alors seule source de lumière, attire mon attention et finit brutalement par me ramener à la réalité, chassant ainsi Drew de mes pensées. Je ne cille pas. "Nous ignorons pour l'instant la cause et les détails de l'explosion."
- Delo sdelano.
- Moya dorogaya, nam bylo ochen priyatno rabotat s vami.
- Udachi Ivanoff.
Impassible, je ne m'attarde pas avant de raccrocher. Mon reflet dans le miroir qui me fait désormais face me renvoie l'image d'une parfaite inconnue. Brune, cernée, l'air désillusionnée et d'une pâleur cadavérique. Cette fille ne sourit pas. A t-elle seulement déjà sourit?
Alors DeVitto, on fait quoi maintenant? Sa question est accueillie par un silence qu'un bruit sourd semblable à celui d'un hélicoptère finit soudainement par briser. Il ne me faut alors pas plus de deux secondes pour comprendre, ce que Wren en revanche semble peiner à faire. "On" comme dans toi et moi? Non sans regret, je passe une main derrière mon dos et attrape furtivement mon automatique dissimulée sous mon chemisier avant de la pointer en sa direction. Rien. Ses genoux le lâchent tandis que sa tête ne tarde pas à percuter le sol. La lumière s'éteint maintenant dans ses yeux et je me console dans l'idée que vivant, il ne m'aurait été d'aucune utilité.
Il est temps de mettre les voiles.
⊹⊹⊹

FBI, lâchez votre arme! Maintenant! Ne voyant aucun échappatoire, je n'ai d'autre choix que de m'arrêter. Je me tourne désormais vers eux et finis lentement par déposer mon arme au sol. A genoux, mettez vos mains où je peux les voir. Je m'exécute, le souffle court. Sans plus attendre, un des agents que je devine être le Directeur des Opérations accourt alors afin de me lier les poignets. Contactez la Division, on l'interroge sur place. A toutes les équipes, ici Jefferson. Maintenez vos positions.

⊹⊹⊹

Où est Ivanoff? Je ne réponds pas. Pas encore. Je me contente à la place de le dévisager d'un regard rempli d'austérité simplement le temps d'esquisser un mince sourire. Écoute-moi bien. J'ai la possibilité de t'obtenir quelque chose que seul un idiot refuserait et ce quelle que soit la cause qu'il prétendrait défendre. En échange, tu vas nous aider à trouver Ivanoff et à empêcher cette bombe d'exploser. On n'a pas beaucoup de temps alors tu ferais mieux de te décider: ou tu m'aides maintenant, ou tu crèves ici avec nous et quatre millions d'autres habitants dont tu auras la mort sur la conscience. Sur ses mots, il se rassoit flegmatiquement sur la chaise qui me fait face tandis que ses yeux se promènent maintenant dans les miens. S'il y a bien une chose qu'il doit savoir au moins autant que moi, c'est que je suis tout sauf idiote. L'attente semble lui être insoutenable. Naturellement, je m'en délecte. Je veux l'immunité complète et signée. Decody, mettez-moi en contact avec la Maison Blanche.
Du couloir ne me sont parvenus que des marmonnements. Jefferson ne revient qu'un quart d'heure plus tard dont chaque minute m'ont usé les nerfs comme du papier de verre. Mens et l'accord est annulé. A part ma mort et accessoirement la leur, je ne vois pas très bien ce que j'y gagnerais à mentir. Je parlerai une fois que mon représentant aura confirmé l'immunité. Il demande alors à ce qu'on s'acquitte de ma requête et finit par coller son téléphone contre mon oreille étant dans l'incapacité de le tenir moi-même. J'écoute. dis-je tout en continuant à fixer Jefferson. Mademoiselle DeVitto, ici Maître Cartwright. J'ai actuellement le document sous les yeux, tout est en ordre. Vous obtenez l'immunité complète. Je n'ai pas le temps de le remercier que Jefferson m'ôte instantanément le téléphone. Où est Ivanoff? On a toujours le choix. Voilà une expression qui prend désormais tout son sens. Le choix entre mettre fin à l'attente interminable que je sais leur avoir infliger depuis plus d'une heure et ainsi respecter ma part du marché, et jouir de chaque seconde supplémentaire que je passerai à jouer avec leurs nerfs. Il est cependant regrettable que cette bombe soit programmée pour exploser à minuit. Son hélicoptère l'attend aux studios désaffectés de Silver Screen. Il part quand? Maintenant. Decody, je veux les images satellites et confirmation de la cible. Elle reste ici jusqu'à ce qu'on ait vérifié. Mon regard se vide désormais à mesure qu'il s'éloigne tandis qu'une question semblable à l'effet qu'aurait une claque en pleine face vient me tourmenter l'esprit: la liberté vaut-elle seulement d'être vécue si nous n'avons personne avec qui la consommer?